Saints Louis et Zélie Martin
Premier couple canonisé dans l’histoire de l’Eglise (2015), Louis et Zélie Martin sont des chrétiens du XIXème siècle dont, à première vue, rien ne les distingue d’autres chrétiens. Durant leur existence, ils n’ont pas fondé de congrégations, ni accompli de « miracles ». Tous deux ont vécu l’aventure de la sainteté, témoigné de l’Évangile dans l’ordinaire du quotidien, à travers les épreuves et les joies de leur vie d’époux chrétiens, de parents et d’artisans professionnels.
Un des points forts de leur témoignage est de rendre crédible l’accession de tous à la sainteté, quel que soit son état de vie, son âge, sa condition sociale. Ils démystifient ce qu’est « être saint ». Voilà une bonne, une très bonne nouvelle adressée aux couples qui désirent mettre Dieu au cœur de leur vie, telle qu’elle est ; et goûter combien il est bon de Le servir en toutes choses. Et par conséquent, de faire de ce but suréminent, le moteur éducatif de toute une vie. Là se situe la note particulière de leur « éducation ». Car aimer Dieu en vérité, c’est aussi entraîner, emmener autrui vers lui par l’élan de toute sa vie. Conduire à lui, éduquer au sens premier du mot…
Pour éclairer la dimension totalisante de l’éducation à la sainteté des parents Martin, illustrer leur charisme éducatif qui leur permit d’acheminer leurs enfants sur les voies de la sainteté – et aussi d’y attirer leur proche -, je ciblerai trois points :
- Leur vie familiale
- Leur vie professionnelle
- Leur engagement ecclésial ouvert sur le monde
Louis et Zélie, éducateurs dans leur vie familiale
« Nos enfants, c’était tout notre bonheur, écrit Zélie (4 mars 1877).
Louis et Zélie s’accordaient à élever, à éduquer leurs enfants « pour le Ciel », selon une expression de Zélie. Ne voyons en cela aucune forme d’utopie, d’illuminisme ou de phobie du monde. Forts du dynamisme de leur foi, en conformité avec elle, Zélie et Louis entendent éveiller leurs enfants à ce qui, à leurs yeux, est tout simplement la finalité de l’existence humaine : Dieu, son Royaume, « le Ciel ». Voilà le focus éducatif de Zélie et Louis, pleinement en phase leur devise : « Dieu premier servi ». Vivre la primauté spirituelle de Dieu, vivre de l’espérance du Ciel, engager avec eux leurs enfants, les éduquer, les élever « pour le Ciel », quoi de plus logique ?
Un des éléments essentiels de cet idéal de vie est, nul ne s’en étonnera, la prière, l’apprentissage de la prière. Matin et soir, les enfants Martin étaient réunis pour prier, apprendre à écouter le mystère du Dieu vivant, à Lui parler avec simplicité et sincérité de cœur, à être réceptif à sa Présence et à son appel.
Parallèlement à la prière commune, il y avait la participation à la célébration des sacrements, en particulier au sacrement de l’Eucharistie (j’y reviendrai). Louis et Zélie s’adonnaient aussi à la lecture de la vie des saints. Et tel un parfum évangélique de toutes ces pratiques, ils cultivaient aussi une ouverture résolue à l’esprit de charité et d’humilité. De quelle manière ? Par l’attention aux plus pauvres, aux personnes en déshérence. Cf. la récente exhortation apostolique du pape Léon XIV, Dilexi te…
Un exemple, parmi bien d’autres… Eloquent d’audace spontanée et d’empathie avec les plus vulnérables.
Avançant dans le hall de la gare, Louis croise un épileptique incapable de payer son billet de train. Que décide-t-il de faire ? Il va mendier. Il n’hésite pas à quêter pour le malheureux de la manière la plus simple et la plus efficace. Il tend son chapeau aux voyageurs présents autour de lui et parvient à réunir la somme. Une fois le billet acheté, il accompagne et installe lui-même le malade dans le wagon[1].
Plus fondamentalement, Zélie et Louis éduquent leur enfant à l’apprentissage du don de soi par l’éveil à une relation vivante, personnelle et volontaire à Jésus, quel que soit les circonstances – ce que Thérèse traduira par la formule toute salésienne « faire plaisir à Jésus », notamment dans les choses apparemment les plus insignifiantes.
Eduquer à la sainteté au sein de leur vie professionnelle
Louis s’est orienté vers le métier d’horloger. Zélie vers celui de dentellière.
Bien établis dans leur activité professionnelle au jour de leur mariage (1858), tous deux formaient un couple d’entrepreneurs moderne pour l’époque.
Louis était « foncièrement honnête et consciencieux », se souvient Marie, sa fille aînée. À son horlogerie-bijouterie, n’ayant pas de commis, lui-même assurait tout le travail : réception des clients, réparation des horloges et des montres, soit à son magasin, soit à domicile. Son attention patiente aux clients, l’excellence de son travail, sa mansuétude envers tous lui octroyaient une réputation de sainteté. Plusieurs témoignages de clients l’attestent ; disant de lui : « le saint Monsieur Martin ».
A partir de 1863 – année où Zélie accouche de Léonie, sa troisième enfant -, Louis épaule plus activement sa femme dans son commerce.
Outre un juste salaire que les Martin honorent sans retard envers leurs employés, Zélie cultive un climat de concorde familiale au sein de son entreprise qui procurera du travail à 18 ouvrières à domicile. Beaucoup remercient Zélie de sa bienveillance. De nombreuses amitiés se nouent à partir et au-delà du temps de travail réalisé en étroite collaboration.
C’est aussi cela « éduquer » : affirmer probité et intégrité dans l’activité professionnelle qui était la leur, favorisant un climat de concorde et de confiance avec ses employés. De cela, les filles Martin témoigneront. Chacune en conservera un vivant souvenir. Autre facette éducative de leur mère.
Eduquer par un engagement ecclésial ouvert sur le monde
C’est là est des points majeurs de la foi évangélique de Louis et Zélie. Leur amour de Dieu ne pouvait être confiné à la seule sphère de la prière et des rituels liturgiques. Il s’affirme aussi par une implication socio-ecclésiale. Comment séparer communauté où s’ancre notre foi chrétienne et société en laquelle plonge nos racines citoyennes ? Zélie et Louis s’inscrivent tout naturellement, à l’exemple et à la suite de Jésus-Christ, dans l’allant d’une Incarnation continuée, ici et maintenant de leur existence. L’éducation de leurs enfants s’en trouvera fortement imprégnée. Elle rayonnera de ce réalisme spirituel fondée dans l’Evangile, caractérisée par une ouverture résolue aux plus pauvres, un engagement en diverses associations de piété et caritatives. De quelle manière, concrètement ?…
Zélie était affiliée au Tiers-Ordre de saint François d’Assise et à d’autres mouvements de dévotion au Cœur de Jésus. Louis faisait partie de la Société du Saint-Sacrement, de la Conférence Saint-Vincent-de-Paul fondé par Frédéric Ozanam. Il adhérait aussi aux Cercles Catholiques créés par Albert de Mun, sensibilisés à la misère du monde ouvrier. Ce qui témoigne de la conscience de Louis et Zélie aux problématiques sociales de leur époque. Cependant, leur engagement ne s’illustrait pas seulement par l’affiliation à des associations de piété, l’adhésion aux mouvements alors en vogue du Catholicisme social et les dons aux œuvres caritatives.
Le couple Martin manifeste également une sollicitude spontanée aux plus démunis rencontrés sur leur chemin. Nous avons mentionné l’exemple touchant de l’épileptique aidé par Louis dans le hall d’une gare… Un autre épisode, parmi les plus marquants, est celui d’un pauvre SDF, âgé, secouru un dimanche de l’année 1876, au retour de la messe. Les Martin viennent à lui offrant d’abord des souliers, puis le couvert du dîner. Par la suite, ils s’occupent de lui au point d’obtenir son entrée dans un Hospice, non sans de nombreuses démarches assurées par l’opiniâtreté de Louis (lettres, pétitions…). Une vraie fioretti au déroulé particulièrement émouvant[2]. Zélie avait pris l’habitude de visiter, avec discrétion, « des familles pauvres avec des pots au feu, des bouteilles de vin et des pièces de quarante sous, et personne ne le savait que nous deux », atteste Louise Marais, ancienne servante des Martin, qui accompagnait Zélie dans ces visites auprès des plus défavorisés au plan social.
Ce feu de la charité en acte trouvait dans l’Eucharistie le secret de son ardeur. Eucharistie qui était aussi le lieu primordial du ressourcement spirituel du couple Martin. En effet, sauf exception, Louis et Zélie vont tous les jours à la messe. Après le décès de son épouse, alors qu’il n’exerce plus d’activité professionnelle, Louis continue à aller à l’Eucharistie de six heures du matin. Et lorsque ses filles lui en demandèrent la raison, il leur répondit : « Parce que c’est la messe des pauvres et des ouvriers », qui y assistent avant d’aller au travail. Une réponse pleine d’une vérité eucharistique que Louis vit profondément : une solidarité de cœur avec les plus miséreux au sein même de leur localité, leur commune.
Il y aurait bien d’autres faits à mentionner où Zélie et Louis firent preuve d’une exemplarité évangélique, notamment dans l’épreuve de la maladie, du veuvage et de la mort. Ne cherchons pas ailleurs le secret du talent éducatif dont ils firent preuve.
Pensons à la touchante sérénité de Zélie, à sa force d’âme qui encourage les siens, alors qu’elle est atteinte d’un cancer au sein qui finira par l’emporter.
Pensons à la constance spirituelle de Louis pour donner sens à sa faiblesse physique et mentale au terme de sa vie, pendant et après son internement à l’hôpital du Bon Sauveur de Caen. L’exemple poignant de Louis démontre que l’altération psychique et la diminution des forces physiques peuvent être aussi un chemin de résilience pour vivre la dynamique de l’amour, de l’espérance et de la foi en l’Éternité. Là réside la rectitude éthique et la fécondité spirituelle de l’éducation qu’il prodigua auprès de ses filles et de son témoignage de sainteté.
A partir de leur vie conjugale, de leur vie familiale, de leur vie ecclésiale et socio-professionnelle, Louis et Zélie, en tant que chrétiens, ont fait de leur quotidien le milieu de leur posture éducative. Car leur existence fut, de jour en jour, l’espace de la bonté reçue de Dieu ; et de cette divine bonté, tout deux en firent une œuvre d’apprentissage de la sainteté au quotidien. Ne cherchons pas ailleurs l’âme de l’éducation dont ils entourèrent leurs filles.
Sanctification reçue et éducation donnée sont inséparables. D’où l’exemplarité pérenne de la sainteté de Zélie et de Louis. « Ne parle de Dieu que si l’on t’interroge, mais vit de telle sorte qu’on t’interroge » (François de Sales). Louis et Zélie ont vécu de telle sorte qu’ils ont touché, questionné leurs proches. Ils ne cessent encore d’interroger celles et ceux qui s’approchent de leur vie si simple. Si simplement évangélique.
Transcendante à tous les temps, la sainteté de Zélie et Louis convient à notre XXIème siècle parce qu’elle est en prise avec le cœur de l’Evangile dans l’ordinaire de la vie courante. Or qu’est-ce que le cœur de l’Evangile ? Qu’en toutes choses, il s’agit d’aimer, de croire, d’espérer en la présence de Jésus-Christ. Ces trois actes, hier, comme aujourd’hui et demain, condensent le devenir essentiel de la vie humaine et de son salut. Zélie et Louis nous le rappellent dans la force et la simplicité de leur attachement à Dieu, qui fut « l’âme » de leur amour mutuel, du charisme pédagogique d’une éducation polarisée par l’appel à la sainteté.
Leur existence est bel et bien un livre de vie, source d’inspiration pour tout disciple du Christ et chaque famille chrétienne aujourd’hui
[1] Cf. Sr GENEVIÈVE, Le père de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, op cit, p. 26-27; cf. S. PIAT, op cit, p. 120.
[2] « …au commencement de l’hiver, ton père le rencontre, un dimanche, qu’il faisait très froid, il avait les pieds nus et grelottait. Pris de pitié pour cet infortuné, il a commencé toutes sortes de démarches pour le faire entrer à l’Hospice. Combien de pas il a fait et que de lettres il a écrites pour avoir son extrait de Baptême! et des pétitions! Mais tout cela était en pure perte car on a découvert que le bonhomme n’avait que soixante-sept ans, trois de moins que l’âge requis. Cependant, ton père ne s’est pas tenu pour battu, il avait cette cause à coeur, et il a dressé de nouveau toutes ses batteries pour le faire entrer aux Incurables. Le pauvre homme a une hernie, mais d’habitude on n’y est pas reçu pour si peu et je n’espérais rien. Finalement, il y est entré mercredi dernier, contre toute espérance. Ton père a été le dénicher dans sa grange, mardi soir, et le lendemain matin, il l’a installé. Il a revu le vieillard aujourd’hui, qui pleurait de joie de se trouver si parfaitement heureux; malgré son esprit affaibli, il s’efforçait de remercier et de prouver sa reconnaissance” (Lettre à sa fille Pauline, le 3 décembre 1876 (CF 175, p. 279). Lettre à sa fille Pauline, le 3 décembre 1876 (CF 175, p. 279).
Deux points ont déjà été détaillés dans les entretiens précédents : la charité et l’éducation dans la famille Martin. Autant dire la transmission dans la famille de l’essentiel : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Que dire après cela de la sainteté dans la famille Martin ?
Désir de sainteté des parents
Il est sûr que la sainteté ne tombe pas dans les berceaux au moment de la naissance. Le désir de sainteté, c’est déjà manifester sa foi en l’amour de Dieu qui nous appelle à vivre avec lui dans l’éternité. Le désir de sainteté c’est déjà notre réponse personnelle à la volonté de Dieu : « Père, je veux que là où je suis, ils soient aussi avec moi, car telle est ta volonté » dit Jésus
« Qui est mon frère, ma sœur, mon père, ma mère… ? » demande Jésus à la foule amassée autour de lui. « Qui est ma famille ? aurait-il pu dire… Et il donne la réponse : « celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les Cieux ». Voilà un résumé de ce que fut la famille Martin. Quelle est la volonté de Dieu sur eux ? Il leur faudra la chercher, dans la souplesse.
Chercher la volonté de Dieu
Ils voulaient être saints, et aux calendriers de l’époque figuraient essentiellement des prêtres, des religieux et des bonnes sœurs. Donc l’un et l’autre ont cherché à mener une vie de religieux-se. Apparemment, il semble que tous deux se soient fourvoyés dans des voies qui n’étaient assurément pas celles de la volonté de Dieu. En fait, c’est l’espace de liberté que nous laisse Dieu pour discerner : mais Il veille et nous parle par les événements. Donc, non, ils ne prendront pas l’habit religieux, ils mèneront, en plein monde la vie… « normale » si on peut dire, d’époux et de parents, avec leur progéniture.
Ils auront 9 enfants, 7 filles et 2 garçons. 5 filles seulement survivront. Marie et Pauline qui se suivent à un an près, puis Léonie, que les décès des petits isoleront dans la fratrie, puis Céline et Thérèse.
Louis et Zélie sont de familles très chrétiennes. Lorsque Louis sera étudiant, sa mère lui écrira en lui recommandant de rester bien humble ! Il l’était, donc ! Côté Zélie (Guérin), c’est plutôt la stricte observance, au point que Mme Guérin, qui avait ouvert un café pour gagner un peu d’argent, a dû fermer boutique : eh oui, elle faisait la leçon aux hommes qui venaient y commander un bon petit verre ! Elle s’attendait peut-être à ce qu’ils viennent ne demander qu’un chocolat chaud ! Zélie a souffert de son éducation trop stricte.
Au moment de leur mariage Louis et Zélie sont des personnes d’âge mûr. Tous deux travaillent, et sont même auto-entrepreneurs ; Louis est artisan horloger-bijoutier ; Zélie fait dans la dentelle, et pas n’importe laquelle : une des plus prisées dans les cours royales de l’époque. Nous sommes dans les années 1850-70.
– Zélie, détournée de sa « vocation » par la supérieure des filles de la charité de l’hôpital, s’est orientée résolument vers le mariage, confiant à Dieu le soin de mettre sur son chemin le mari désiré. Louis, a compris que la vocation des Pères du Grand-St-Bernard n’est pas pour lui, il est donc résolu à vivre d’une foi aussi vive, avec le soutien du curé et de ses amis de la paroisse, dans une vie intense de lecture, méditation, prière, à laquelle il adjoindra la pêche en bordure de Sarthe, sous les fenêtres du pavillon qu’il a acquis en guise de centre de retraite.
– Zélie habite chez ses parents, avec sa sœur aînée qui la seconde dans son métier en assurant la partie administrative, et avec un très jeune frère. Louis a son propre appartement, au-dessus de son horlogerie, suffisamment grand pour y accueillir ses parents, en deuil de leurs 3 autres enfants. Il accueille aussi un jeune neveu orphelin.
Le mariage
Et voilà, qu’un jour, Zélie et Louis se croisent sur un pont de leur ville d’Alençon. Zélie s’émeut en ressentant en elle-même la certitude que ce beau jeune homme est celui que Dieu lui a préparé. Quant à Louis, nous n’en savons pas plus, mais il faut en déduire qu’il n’avait pas les yeux dans sa poche ce jour-là, en tout cas une grande souplesse d’âme sous la motion de l’Esprit Saint puisque trois mois plus tard, ils sont mariés.
La cérémonie s’est déroulée à Minuit (remarquons le dévouement de M. le maire et de M. le curé) Cela leur évitait le tralala habituel, mais surtout, ils tenaient à communier à leur messe de mariage, et à minuit, on remettait les pendules à 0 quant au délai à respecter pour le jeûne. Ils se sont mariés « sous le voile », c’est-à-dire qu’au moment du consentement des époux, les témoins étendaient un voile au-dessus d’eux, signifiant la présence de l’Esprit Saint, suprême témoin et engagé dans leur nouvelle vie à deux.
Louis offre une médaille à son épouse, qui représente Tobie et Sarah, ce couple biblique, par avance complètement livré à la volonté de Dieu au 1er soir de leur mariage. Ils choisissent une devise comme guide pour toute leur vie : « Dieu 1er servi ». Ils s’efforceront donc de discerner ce que Dieu attend d’eux, avec l’aide de l’Esprit Saint, et en s’appuyant sur la lecture de l’évangile, et les commandements de l’Eglise : ainsi la volonté de Dieu sera le moteur de toutes leurs décisions, de toute leur action.
Relier les hommes à Dieu
Alors La première des priorités est évidemment de vivre relié à Dieu. Dès le lendemain de la naissance, leurs ’enfants sont portés sur les fonts baptismaux, même si Zélie ne peut y assister.
Etre relié à Dieu, c’est entrer dans la prière, colloque avec Dieu. on connaît la réflexion de Thérèse en voyant son père prier « je compris comment prient les saints ». Tout petits, dès leur réveil, les enfants ont appris à offrir leur journée à Dieu. Céline malade ne sera même pas attentive à la proposition de sa mère qui lui propose un chocolat chaud… Elle fait sa prière. Dieu premier servi, mais avec souplesse : Les parents se rendent à la première messe de leur paroisse. Ce n’est pas un rite, ils seront prêts à changer leurs habitudes pour adapter les horaires de messes aux besoins de leurs filles.
Dieu premier servi : ils choisissent la pénible séparation pour la première communion de leurs filles. Les deux aînées, à l’age de 8 et 7 ans, seront envoyées en pension à 50 km, à l’école des Visitandines où se trouve la sœur religieuse de Zélie : la « sainte tante Marie Dosithée ». Qui peut mieux qu’elle s’en occuper ?
Ce sera aussi après un discernement en couple que Marie retournera en pension pour une retraite spirituelle : – c’est quand même coûteux, dit Louis, elle a tout ce qu’il faut à Alençon. – Oui, mais la dernière fois qu’elle y est allée, elle en est revenue bien changée…, rétorque Zélie. C’est cet argument qui finalement emportera le morceau.
Dieu premier servi dans les frères. Les lettres de Zélie fourmillent d’exemples d’aide de Louis et Zélie au service de leurs proches, croyants ou non, voisins de tous bords, ouvrière ou pauvre dans la rue. Ce que leurs filles imiteront plus tard à leur tour.
Oui, les parents Martin ont eu à cœur de faire désirer la sainteté à leurs enfants. Au reçu du bulletin de classe de Pauline qui est en tête de classe, Zélie lui répond : « C’est très bien ma chérie, mais… je te voudrais un peu plus sainte… »
Leur but est d’avoir beaucoup d’enfants et, comme dit Zélie : « de les élever pour le Ciel ». Des habitants d’Alençon en voyant Mme Martin épuisée par l’épreuve de la mort de 4 enfants en 4 ans, avaient dit : « il vaudrait beaucoup mieux ne les avoir jamais eus … » Mme Martin s’était quelque peu insurgée : « Je ne pouvais supporter ce langage. Je ne trouvais pas que les peines et les soucis pouvaient être mis en balance avec le bonheur éternel de mes enfants » (CF72) D’ailleurs elle avait obtenu plusieurs grâces par l’intercession de ces petits, comme Thérèse plus tard.
Et pour elle-même, Zélie reconnaît tout humblement : « Je désire que toutes mes filles soient saintes et que je les suive de près, mais il faut que je m’y mette… »
La sainteté est une pratique, c’est l’exercice des vertus théologales reçues au baptême : Foi, espérance, charité. Ces vertus qui nous font adhérer à la volonté de Dieu en mettant toute notre confiance en lui. Voilà leur feuille de route.
La foi, je sais en qui j’ai mis ma confiance. Dans son travail, Zélie, se montre reconnaissante envers Dieu entre les mains de qui « elle a remis toutes ses affaires », que les commandes affluent ou se raréfient….. A cette lumière, elle sait encourager son entourage, son frère particulièrement, dans ses difficultés professionnelles.
Leur foi en la main de Dieu au cœur de leur foyer est toujours là, même dans les périodes de grande souffrance. Lorsque par exemple, après 4 filles, ils espèrent tellement, légitimement, la naissance d’un garçon. Qu’ils seraient tellement heureux d’offrir à Dieu pour être son prêtre, un bon missionnaire… Rien de trop beau pour Dieu. Eh bien non, ce premier petit garçon meurt à quelques mois. Un second vient. Celui-là, ils le doivent à une intervention spéciale de saint Joseph, la preuve c’est qu’il arrive au terme d’une neuvaine au jour de sa fête. Et ce deuxième garçon – qu’ils auraient voulu aussi voir prêtre un jour – meurt à l’âge de 8 mois. C’était pourtant le top pour Dieu ! Mais Dieu n’est pas intervenu. Zélie traversera une période de dépression, mais leur réaction est ferme, comme en tant d’autres occasions : « On ne peut murmurer contre la volonté de Dieu ». Sans comprendre, ils adhèrent.
Car l’espérance est là, en toute occasion, même les plus incompréhensibles. Rappelons le cas de Léonie : « on ne sait par où la prendre, même les plus savants en perdraient leur latin » remarque sa mère. Et pourtant elle reconnaît : « Plus je la vois difficile, plus je suis persuadée que Dieu ne la laissera pas ainsi ». Dans la famille Martin, la balle est dans le camp de Dieu. L’espérance ne déçoit pas car l’amour de Dieu pour chacun est toujours présent.
La charité est reçue de Dieu. Cet amour est par nature diffusif. L’amour des Martin s’étend à tous ceux qu’ils rencontrent : la famille proche (on voit comment Zélie console sa belle-sœur à la mort de leur fils, mettant en retrait sa propre peine alors qu’elle vient de perdre une petite fille) ; leur charité va aux ouvrières : elle prend à son compte de refaire tard en soirée le travail mal fait par l’une d’elle, ou décide d’en ré-employer une autre qui ne travaillait pas bien, uniquement parce qu’elle a besoin d’argent. Les filles Martin ont vu leurs parents s’occuper des plus pauvres, trouvés dans la rue ou dans leur taudis, et les imiteront plus tard.
L’amour du prochain, c’est aussi désirer pour lui la sainteté. Les enfants Martin ont recueilli cet héritage missionnaire de leurs parents : Pauline, 12 ans, entend un sermon « si beau, si beau, qu’il convertirait sûrement un grand pécheur qu’elle a en vue et pour lequel elle prie.
L’Amour jusqu’au bout
Ce n’est autre que de tendre vers l’identification au Christ et de participer à sa croix salvatrice. Louis priait pour les siens comme pour ses amis athées. Mais il veut plus : après avoir offert toutes ses filles à Dieu, après avoir subi un long veuvage, il envisage son avenir. Il se rend à l’église de son mariage et là, il reçoit « de si grandes grâces, de telles consolations », que dans un mouvement de confiance, il fait cette prière de donation totale de son être : « Mon Dieu, je suis trop heureux, il n’est pas possible d’aller au Ciel comme cela : je veux souffrir quelque chose pour Vous ! » et il s’offre lui-même. Quelques temps plus tard, il a une atteinte cérébrale, il a des gestes violents, il fait une fugue, il est mis à l’hospice (hôpital psychiatrique), devant se détacher de TOUT : de lui-même (paralysé), de ses droits paternels (mis sous tutelle), séparé des siens… … « Oui j’ai un but, c’est d’aimer Dieu de tout mon cœur » avait-il dit au début de sa maladie. Dans ses moments de lucidité, il est tout tourné vers les autres au point que son infirmière le déclare « son missionnaire » dans le service. Quant aux prières auxquelles on veut l’associer pour sa guérison, il répond : « Il faut seulement demander la volonté du bon Dieu ». Le jour où il retrouvera ses filles au Carmel, il ne pourra que lever le doigt au ciel pour leur signifier que « là-haut on se retrouvera ». Zélie donnera son propre témoignage : elle s’accrochait à la vie pour sauver sa Léonie. Le jour où ses forces déclinent, elle lâche prise : c’est que le bon Dieu fera mieux qu’elle pour sa Léonie. Et l’on sait ce que Dieu a fait pour Léonie, et continue de faire à travers elle.
C’est bien ce que signifiait Zélie, et qui a été écrit sur le reliquaire : « Nous ne serons heureux que lorsque nous serons tous réunis au Ciel ». (Le pape Léon, ce mercredi à l’audience, nous le rappelait : sur terre nous ressentons toujours un manque, la plénitude nous ne la trouverons qu’au Ciel.)
La boucle est bouclée : tout est reçu de Dieu, tout est donné à Dieu. Rendons grâce à l’Esprit Saint qui s’est engagé le jour de leur mariage, qui a conduit toutes choses, et qui a poussé l’Eglise à canoniser des couples, au service de la sainteté des familles et de tous ceux qui demandent leur aide.
Pour que le cadre soit complet, il faut ajouter la Vierge Marie. La statue que nous appelons la Vierge du Sourire a été donnée à Louis jeune homme. Elle est au cœur de la famille. Thérèse nous dit pourquoi dans son poème « Pourquoi je t’aime Ô Marie ». Marie est la mère et le modèle au cœur de la vie ordinaire des familles. Elle a parfaitement correspondu à la volonté de Dieu en accueillant sa Parole et en consentant à ce qui lui était demandé au jour le jour. Et nous vivons de la grande fécondité de sa foi, de son espérance et de sa charité.
En simple conclusion : comment ne pas rejoindre la cordée de toute cette famille Martin qui, dans une vie des plus normales – comme la nôtre -, a répondu à l’appel universel à la sainteté de notre Père des cieux ? Que nous disent-il à chacun de nous ? Dans ce domaine, il n’y a pas de copier-coller. Chacun a SA réponse à donner. Même si toutes les filles Martin sont devenues religieuses, chacune a la caractéristique de son appel et de sa réponse personnelle. Ils nous encouragent à correspondre à la volonté de Dieu sur nous personnellement, en marchant vers le but, avec les ingrédients que Dieu lui-même nous a donnés au baptême, la foi, l’espérance et la charité au service de l’Esprit Saint, en ne s’appuyant que sur Lui, fidèlement, pour la réaliser.
Premier couple canonisé dans l’histoire de l’Eglise (2015), Louis et Zélie Martin sont des chrétiens du XIXème siècle dont, à première vue, rien ne les distingue d’autres chrétiens. Durant leur existence, ils n’ont pas fondé de congrégations, ni accompli de « miracles ». Tous deux ont vécu l’aventure de la sainteté, témoigné de l’Évangile dans l’ordinaire du quotidien, à travers les épreuves et les joies de leur vie d’époux chrétiens, de parents et d’artisans professionnels.
Un des points forts de leur témoignage est de rendre crédible l’accession de tous à la sainteté, quel que soit son état de vie, son âge, sa condition sociale. Ils démystifient ce qu’est « être saint ». Voilà une bonne, une très bonne nouvelle adressée aux couples qui désirent mettre Dieu au cœur de leur vie, telle qu’elle est ; et goûter combien il est bon de Le servir en toutes choses. Et par conséquent, de faire de ce but suréminent, le moteur éducatif de toute une vie. Là se situe la note particulière de leur « éducation ». Car aimer Dieu en vérité, c’est aussi entraîner, emmener autrui vers lui par l’élan de toute sa vie. Conduire à lui, éduquer au sens premier du mot…
Pour éclairer la dimension totalisante de l’éducation à la sainteté des parents Martin, illustrer leur charisme éducatif qui leur permit d’acheminer leurs enfants sur les voies de la sainteté – et aussi d’y attirer leur proche -, je ciblerai trois points :
- Leur vie familiale
- Leur vie professionnelle
- Leur engagement ecclésial ouvert sur le monde
Louis et Zélie, éducateurs dans leur vie familiale
« Nos enfants, c’était tout notre bonheur, écrit Zélie (4 mars 1877).
Louis et Zélie s’accordaient à élever, à éduquer leurs enfants « pour le Ciel », selon une expression de Zélie. Ne voyons en cela aucune forme d’utopie, d’illuminisme ou de phobie du monde. Forts du dynamisme de leur foi, en conformité avec elle, Zélie et Louis entendent éveiller leurs enfants à ce qui, à leurs yeux, est tout simplement la finalité de l’existence humaine : Dieu, son Royaume, « le Ciel ». Voilà le focus éducatif de Zélie et Louis, pleinement en phase leur devise : « Dieu premier servi ». Vivre la primauté spirituelle de Dieu, vivre de l’espérance du Ciel, engager avec eux leurs enfants, les éduquer, les élever « pour le Ciel », quoi de plus logique ?
Un des éléments essentiels de cet idéal de vie est, nul ne s’en étonnera, la prière, l’apprentissage de la prière. Matin et soir, les enfants Martin étaient réunis pour prier, apprendre à écouter le mystère du Dieu vivant, à Lui parler avec simplicité et sincérité de cœur, à être réceptif à sa Présence et à son appel.
Parallèlement à la prière commune, il y avait la participation à la célébration des sacrements, en particulier au sacrement de l’Eucharistie (j’y reviendrai). Louis et Zélie s’adonnaient aussi à la lecture de la vie des saints. Et tel un parfum évangélique de toutes ces pratiques, ils cultivaient aussi une ouverture résolue à l’esprit de charité et d’humilité. De quelle manière ? Par l’attention aux plus pauvres, aux personnes en déshérence. Cf. la récente exhortation apostolique du pape Léon XIV, Dilexi te…
Un exemple, parmi bien d’autres… Eloquent d’audace spontanée et d’empathie avec les plus vulnérables.
Avançant dans le hall de la gare, Louis croise un épileptique incapable de payer son billet de train. Que décide-t-il de faire ? Il va mendier. Il n’hésite pas à quêter pour le malheureux de la manière la plus simple et la plus efficace. Il tend son chapeau aux voyageurs présents autour de lui et parvient à réunir la somme. Une fois le billet acheté, il accompagne et installe lui-même le malade dans le wagon[1].
Plus fondamentalement, Zélie et Louis éduquent leur enfant à l’apprentissage du don de soi par l’éveil à une relation vivante, personnelle et volontaire à Jésus, quel que soit les circonstances – ce que Thérèse traduira par la formule toute salésienne « faire plaisir à Jésus », notamment dans les choses apparemment les plus insignifiantes.
Eduquer à la sainteté au sein de leur vie professionnelle
Louis s’est orienté vers le métier d’horloger. Zélie vers celui de dentellière.
Bien établis dans leur activité professionnelle au jour de leur mariage (1858), tous deux formaient un couple d’entrepreneurs moderne pour l’époque.
Louis était « foncièrement honnête et consciencieux », se souvient Marie, sa fille aînée. À son horlogerie-bijouterie, n’ayant pas de commis, lui-même assurait tout le travail : réception des clients, réparation des horloges et des montres, soit à son magasin, soit à domicile. Son attention patiente aux clients, l’excellence de son travail, sa mansuétude envers tous lui octroyaient une réputation de sainteté. Plusieurs témoignages de clients l’attestent ; disant de lui : « le saint Monsieur Martin ».
A partir de 1863 – année où Zélie accouche de Léonie, sa troisième enfant -, Louis épaule plus activement sa femme dans son commerce.
Outre un juste salaire que les Martin honorent sans retard envers leurs employés, Zélie cultive un climat de concorde familiale au sein de son entreprise qui procurera du travail à 18 ouvrières à domicile. Beaucoup remercient Zélie de sa bienveillance. De nombreuses amitiés se nouent à partir et au-delà du temps de travail réalisé en étroite collaboration.
C’est aussi cela « éduquer » : affirmer probité et intégrité dans l’activité professionnelle qui était la leur, favorisant un climat de concorde et de confiance avec ses employés. De cela, les filles Martin témoigneront. Chacune en conservera un vivant souvenir. Autre facette éducative de leur mère.
Eduquer par un engagement ecclésial ouvert sur le monde
C’est là est des points majeurs de la foi évangélique de Louis et Zélie. Leur amour de Dieu ne pouvait être confiné à la seule sphère de la prière et des rituels liturgiques. Il s’affirme aussi par une implication socio-ecclésiale. Comment séparer communauté où s’ancre notre foi chrétienne et société en laquelle plonge nos racines citoyennes ? Zélie et Louis s’inscrivent tout naturellement, à l’exemple et à la suite de Jésus-Christ, dans l’allant d’une Incarnation continuée, ici et maintenant de leur existence. L’éducation de leurs enfants s’en trouvera fortement imprégnée. Elle rayonnera de ce réalisme spirituel fondée dans l’Evangile, caractérisée par une ouverture résolue aux plus pauvres, un engagement en diverses associations de piété et caritatives. De quelle manière, concrètement ?…
Zélie était affiliée au Tiers-Ordre de saint François d’Assise et à d’autres mouvements de dévotion au Cœur de Jésus. Louis faisait partie de la Société du Saint-Sacrement, de la Conférence Saint-Vincent-de-Paul fondé par Frédéric Ozanam. Il adhérait aussi aux Cercles Catholiques créés par Albert de Mun, sensibilisés à la misère du monde ouvrier. Ce qui témoigne de la conscience de Louis et Zélie aux problématiques sociales de leur époque. Cependant, leur engagement ne s’illustrait pas seulement par l’affiliation à des associations de piété, l’adhésion aux mouvements alors en vogue du Catholicisme social et les dons aux œuvres caritatives.
Le couple Martin manifeste également une sollicitude spontanée aux plus démunis rencontrés sur leur chemin. Nous avons mentionné l’exemple touchant de l’épileptique aidé par Louis dans le hall d’une gare… Un autre épisode, parmi les plus marquants, est celui d’un pauvre SDF, âgé, secouru un dimanche de l’année 1876, au retour de la messe. Les Martin viennent à lui offrant d’abord des souliers, puis le couvert du dîner. Par la suite, ils s’occupent de lui au point d’obtenir son entrée dans un Hospice, non sans de nombreuses démarches assurées par l’opiniâtreté de Louis (lettres, pétitions…). Une vraie fioretti au déroulé particulièrement émouvant[2]. Zélie avait pris l’habitude de visiter, avec discrétion, « des familles pauvres avec des pots au feu, des bouteilles de vin et des pièces de quarante sous, et personne ne le savait que nous deux », atteste Louise Marais, ancienne servante des Martin, qui accompagnait Zélie dans ces visites auprès des plus défavorisés au plan social.
Ce feu de la charité en acte trouvait dans l’Eucharistie le secret de son ardeur. Eucharistie qui était aussi le lieu primordial du ressourcement spirituel du couple Martin. En effet, sauf exception, Louis et Zélie vont tous les jours à la messe. Après le décès de son épouse, alors qu’il n’exerce plus d’activité professionnelle, Louis continue à aller à l’Eucharistie de six heures du matin. Et lorsque ses filles lui en demandèrent la raison, il leur répondit : « Parce que c’est la messe des pauvres et des ouvriers », qui y assistent avant d’aller au travail. Une réponse pleine d’une vérité eucharistique que Louis vit profondément : une solidarité de cœur avec les plus miséreux au sein même de leur localité, leur commune.
Il y aurait bien d’autres faits à mentionner où Zélie et Louis firent preuve d’une exemplarité évangélique, notamment dans l’épreuve de la maladie, du veuvage et de la mort. Ne cherchons pas ailleurs le secret du talent éducatif dont ils firent preuve.
Pensons à la touchante sérénité de Zélie, à sa force d’âme qui encourage les siens, alors qu’elle est atteinte d’un cancer au sein qui finira par l’emporter.
Pensons à la constance spirituelle de Louis pour donner sens à sa faiblesse physique et mentale au terme de sa vie, pendant et après son internement à l’hôpital du Bon Sauveur de Caen. L’exemple poignant de Louis démontre que l’altération psychique et la diminution des forces physiques peuvent être aussi un chemin de résilience pour vivre la dynamique de l’amour, de l’espérance et de la foi en l’Éternité. Là réside la rectitude éthique et la fécondité spirituelle de l’éducation qu’il prodigua auprès de ses filles et de son témoignage de sainteté.
A partir de leur vie conjugale, de leur vie familiale, de leur vie ecclésiale et socio-professionnelle, Louis et Zélie, en tant que chrétiens, ont fait de leur quotidien le milieu de leur posture éducative. Car leur existence fut, de jour en jour, l’espace de la bonté reçue de Dieu ; et de cette divine bonté, tout deux en firent une œuvre d’apprentissage de la sainteté au quotidien. Ne cherchons pas ailleurs l’âme de l’éducation dont ils entourèrent leurs filles.
Sanctification reçue et éducation donnée sont inséparables. D’où l’exemplarité pérenne de la sainteté de Zélie et de Louis. « Ne parle de Dieu que si l’on t’interroge, mais vit de telle sorte qu’on t’interroge » (François de Sales). Louis et Zélie ont vécu de telle sorte qu’ils ont touché, questionné leurs proches. Ils ne cessent encore d’interroger celles et ceux qui s’approchent de leur vie si simple. Si simplement évangélique.
Transcendante à tous les temps, la sainteté de Zélie et Louis convient à notre XXIème siècle parce qu’elle est en prise avec le cœur de l’Evangile dans l’ordinaire de la vie courante. Or qu’est-ce que le cœur de l’Evangile ? Qu’en toutes choses, il s’agit d’aimer, de croire, d’espérer en la présence de Jésus-Christ. Ces trois actes, hier, comme aujourd’hui et demain, condensent le devenir essentiel de la vie humaine et de son salut. Zélie et Louis nous le rappellent dans la force et la simplicité de leur attachement à Dieu, qui fut « l’âme » de leur amour mutuel, du charisme pédagogique d’une éducation polarisée par l’appel à la sainteté.
Leur existence est bel et bien un livre de vie, source d’inspiration pour tout disciple du Christ et chaque famille chrétienne aujourd’hui
[1] Cf. Sr GENEVIÈVE, Le père de sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, op cit, p. 26-27; cf. S. PIAT, op cit, p. 120.
[2] « …au commencement de l’hiver, ton père le rencontre, un dimanche, qu’il faisait très froid, il avait les pieds nus et grelottait. Pris de pitié pour cet infortuné, il a commencé toutes sortes de démarches pour le faire entrer à l’Hospice. Combien de pas il a fait et que de lettres il a écrites pour avoir son extrait de Baptême! et des pétitions! Mais tout cela était en pure perte car on a découvert que le bonhomme n’avait que soixante-sept ans, trois de moins que l’âge requis. Cependant, ton père ne s’est pas tenu pour battu, il avait cette cause à coeur, et il a dressé de nouveau toutes ses batteries pour le faire entrer aux Incurables. Le pauvre homme a une hernie, mais d’habitude on n’y est pas reçu pour si peu et je n’espérais rien. Finalement, il y est entré mercredi dernier, contre toute espérance. Ton père a été le dénicher dans sa grange, mardi soir, et le lendemain matin, il l’a installé. Il a revu le vieillard aujourd’hui, qui pleurait de joie de se trouver si parfaitement heureux; malgré son esprit affaibli, il s’efforçait de remercier et de prouver sa reconnaissance” (Lettre à sa fille Pauline, le 3 décembre 1876 (CF 175, p. 279). Lettre à sa fille Pauline, le 3 décembre 1876 (CF 175, p. 279).
Deux points ont déjà été détaillés dans les entretiens précédents : la charité et l’éducation dans la famille Martin. Autant dire la transmission dans la famille de l’essentiel : l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Que dire après cela de la sainteté dans la famille Martin ?
Désir de sainteté des parents
Il est sûr que la sainteté ne tombe pas dans les berceaux au moment de la naissance. Le désir de sainteté, c’est déjà manifester sa foi en l’amour de Dieu qui nous appelle à vivre avec lui dans l’éternité. Le désir de sainteté c’est déjà notre réponse personnelle à la volonté de Dieu : « Père, je veux que là où je suis, ils soient aussi avec moi, car telle est ta volonté » dit Jésus
« Qui est mon frère, ma sœur, mon père, ma mère… ? » demande Jésus à la foule amassée autour de lui. « Qui est ma famille ? aurait-il pu dire… Et il donne la réponse : « celui qui fait la volonté de mon Père qui est dans les Cieux ». Voilà un résumé de ce que fut la famille Martin. Quelle est la volonté de Dieu sur eux ? Il leur faudra la chercher, dans la souplesse.
Chercher la volonté de Dieu
Ils voulaient être saints, et aux calendriers de l’époque figuraient essentiellement des prêtres, des religieux et des bonnes sœurs. Donc l’un et l’autre ont cherché à mener une vie de religieux-se. Apparemment, il semble que tous deux se soient fourvoyés dans des voies qui n’étaient assurément pas celles de la volonté de Dieu. En fait, c’est l’espace de liberté que nous laisse Dieu pour discerner : mais Il veille et nous parle par les événements. Donc, non, ils ne prendront pas l’habit religieux, ils mèneront, en plein monde la vie… « normale » si on peut dire, d’époux et de parents, avec leur progéniture.
Ils auront 9 enfants, 7 filles et 2 garçons. 5 filles seulement survivront. Marie et Pauline qui se suivent à un an près, puis Léonie, que les décès des petits isoleront dans la fratrie, puis Céline et Thérèse.
Louis et Zélie sont de familles très chrétiennes. Lorsque Louis sera étudiant, sa mère lui écrira en lui recommandant de rester bien humble ! Il l’était, donc ! Côté Zélie (Guérin), c’est plutôt la stricte observance, au point que Mme Guérin, qui avait ouvert un café pour gagner un peu d’argent, a dû fermer boutique : eh oui, elle faisait la leçon aux hommes qui venaient y commander un bon petit verre ! Elle s’attendait peut-être à ce qu’ils viennent ne demander qu’un chocolat chaud ! Zélie a souffert de son éducation trop stricte.
Au moment de leur mariage Louis et Zélie sont des personnes d’âge mûr. Tous deux travaillent, et sont même auto-entrepreneurs ; Louis est artisan horloger-bijoutier ; Zélie fait dans la dentelle, et pas n’importe laquelle : une des plus prisées dans les cours royales de l’époque. Nous sommes dans les années 1850-70.
– Zélie, détournée de sa « vocation » par la supérieure des filles de la charité de l’hôpital, s’est orientée résolument vers le mariage, confiant à Dieu le soin de mettre sur son chemin le mari désiré. Louis, a compris que la vocation des Pères du Grand-St-Bernard n’est pas pour lui, il est donc résolu à vivre d’une foi aussi vive, avec le soutien du curé et de ses amis de la paroisse, dans une vie intense de lecture, méditation, prière, à laquelle il adjoindra la pêche en bordure de Sarthe, sous les fenêtres du pavillon qu’il a acquis en guise de centre de retraite.
– Zélie habite chez ses parents, avec sa sœur aînée qui la seconde dans son métier en assurant la partie administrative, et avec un très jeune frère. Louis a son propre appartement, au-dessus de son horlogerie, suffisamment grand pour y accueillir ses parents, en deuil de leurs 3 autres enfants. Il accueille aussi un jeune neveu orphelin.
Le mariage
Et voilà, qu’un jour, Zélie et Louis se croisent sur un pont de leur ville d’Alençon. Zélie s’émeut en ressentant en elle-même la certitude que ce beau jeune homme est celui que Dieu lui a préparé. Quant à Louis, nous n’en savons pas plus, mais il faut en déduire qu’il n’avait pas les yeux dans sa poche ce jour-là, en tout cas une grande souplesse d’âme sous la motion de l’Esprit Saint puisque trois mois plus tard, ils sont mariés.
La cérémonie s’est déroulée à Minuit (remarquons le dévouement de M. le maire et de M. le curé) Cela leur évitait le tralala habituel, mais surtout, ils tenaient à communier à leur messe de mariage, et à minuit, on remettait les pendules à 0 quant au délai à respecter pour le jeûne. Ils se sont mariés « sous le voile », c’est-à-dire qu’au moment du consentement des époux, les témoins étendaient un voile au-dessus d’eux, signifiant la présence de l’Esprit Saint, suprême témoin et engagé dans leur nouvelle vie à deux.
Louis offre une médaille à son épouse, qui représente Tobie et Sarah, ce couple biblique, par avance complètement livré à la volonté de Dieu au 1er soir de leur mariage. Ils choisissent une devise comme guide pour toute leur vie : « Dieu 1er servi ». Ils s’efforceront donc de discerner ce que Dieu attend d’eux, avec l’aide de l’Esprit Saint, et en s’appuyant sur la lecture de l’évangile, et les commandements de l’Eglise : ainsi la volonté de Dieu sera le moteur de toutes leurs décisions, de toute leur action.
Relier les hommes à Dieu
Alors La première des priorités est évidemment de vivre relié à Dieu. Dès le lendemain de la naissance, leurs ’enfants sont portés sur les fonts baptismaux, même si Zélie ne peut y assister.
Etre relié à Dieu, c’est entrer dans la prière, colloque avec Dieu. on connaît la réflexion de Thérèse en voyant son père prier « je compris comment prient les saints ». Tout petits, dès leur réveil, les enfants ont appris à offrir leur journée à Dieu. Céline malade ne sera même pas attentive à la proposition de sa mère qui lui propose un chocolat chaud… Elle fait sa prière. Dieu premier servi, mais avec souplesse : Les parents se rendent à la première messe de leur paroisse. Ce n’est pas un rite, ils seront prêts à changer leurs habitudes pour adapter les horaires de messes aux besoins de leurs filles.
Dieu premier servi : ils choisissent la pénible séparation pour la première communion de leurs filles. Les deux aînées, à l’age de 8 et 7 ans, seront envoyées en pension à 50 km, à l’école des Visitandines où se trouve la sœur religieuse de Zélie : la « sainte tante Marie Dosithée ». Qui peut mieux qu’elle s’en occuper ?
Ce sera aussi après un discernement en couple que Marie retournera en pension pour une retraite spirituelle : – c’est quand même coûteux, dit Louis, elle a tout ce qu’il faut à Alençon. – Oui, mais la dernière fois qu’elle y est allée, elle en est revenue bien changée…, rétorque Zélie. C’est cet argument qui finalement emportera le morceau.
Dieu premier servi dans les frères. Les lettres de Zélie fourmillent d’exemples d’aide de Louis et Zélie au service de leurs proches, croyants ou non, voisins de tous bords, ouvrière ou pauvre dans la rue. Ce que leurs filles imiteront plus tard à leur tour.
Oui, les parents Martin ont eu à cœur de faire désirer la sainteté à leurs enfants. Au reçu du bulletin de classe de Pauline qui est en tête de classe, Zélie lui répond : « C’est très bien ma chérie, mais… je te voudrais un peu plus sainte… »
Leur but est d’avoir beaucoup d’enfants et, comme dit Zélie : « de les élever pour le Ciel ». Des habitants d’Alençon en voyant Mme Martin épuisée par l’épreuve de la mort de 4 enfants en 4 ans, avaient dit : « il vaudrait beaucoup mieux ne les avoir jamais eus … » Mme Martin s’était quelque peu insurgée : « Je ne pouvais supporter ce langage. Je ne trouvais pas que les peines et les soucis pouvaient être mis en balance avec le bonheur éternel de mes enfants » (CF72) D’ailleurs elle avait obtenu plusieurs grâces par l’intercession de ces petits, comme Thérèse plus tard.
Et pour elle-même, Zélie reconnaît tout humblement : « Je désire que toutes mes filles soient saintes et que je les suive de près, mais il faut que je m’y mette… »
La sainteté est une pratique, c’est l’exercice des vertus théologales reçues au baptême : Foi, espérance, charité. Ces vertus qui nous font adhérer à la volonté de Dieu en mettant toute notre confiance en lui. Voilà leur feuille de route.
La foi, je sais en qui j’ai mis ma confiance. Dans son travail, Zélie, se montre reconnaissante envers Dieu entre les mains de qui « elle a remis toutes ses affaires », que les commandes affluent ou se raréfient….. A cette lumière, elle sait encourager son entourage, son frère particulièrement, dans ses difficultés professionnelles.
Leur foi en la main de Dieu au cœur de leur foyer est toujours là, même dans les périodes de grande souffrance. Lorsque par exemple, après 4 filles, ils espèrent tellement, légitimement, la naissance d’un garçon. Qu’ils seraient tellement heureux d’offrir à Dieu pour être son prêtre, un bon missionnaire… Rien de trop beau pour Dieu. Eh bien non, ce premier petit garçon meurt à quelques mois. Un second vient. Celui-là, ils le doivent à une intervention spéciale de saint Joseph, la preuve c’est qu’il arrive au terme d’une neuvaine au jour de sa fête. Et ce deuxième garçon – qu’ils auraient voulu aussi voir prêtre un jour – meurt à l’âge de 8 mois. C’était pourtant le top pour Dieu ! Mais Dieu n’est pas intervenu. Zélie traversera une période de dépression, mais leur réaction est ferme, comme en tant d’autres occasions : « On ne peut murmurer contre la volonté de Dieu ». Sans comprendre, ils adhèrent.
Car l’espérance est là, en toute occasion, même les plus incompréhensibles. Rappelons le cas de Léonie : « on ne sait par où la prendre, même les plus savants en perdraient leur latin » remarque sa mère. Et pourtant elle reconnaît : « Plus je la vois difficile, plus je suis persuadée que Dieu ne la laissera pas ainsi ». Dans la famille Martin, la balle est dans le camp de Dieu. L’espérance ne déçoit pas car l’amour de Dieu pour chacun est toujours présent.
La charité est reçue de Dieu. Cet amour est par nature diffusif. L’amour des Martin s’étend à tous ceux qu’ils rencontrent : la famille proche (on voit comment Zélie console sa belle-sœur à la mort de leur fils, mettant en retrait sa propre peine alors qu’elle vient de perdre une petite fille) ; leur charité va aux ouvrières : elle prend à son compte de refaire tard en soirée le travail mal fait par l’une d’elle, ou décide d’en ré-employer une autre qui ne travaillait pas bien, uniquement parce qu’elle a besoin d’argent. Les filles Martin ont vu leurs parents s’occuper des plus pauvres, trouvés dans la rue ou dans leur taudis, et les imiteront plus tard.
L’amour du prochain, c’est aussi désirer pour lui la sainteté. Les enfants Martin ont recueilli cet héritage missionnaire de leurs parents : Pauline, 12 ans, entend un sermon « si beau, si beau, qu’il convertirait sûrement un grand pécheur qu’elle a en vue et pour lequel elle prie.
L’Amour jusqu’au bout
Ce n’est autre que de tendre vers l’identification au Christ et de participer à sa croix salvatrice. Louis priait pour les siens comme pour ses amis athées. Mais il veut plus : après avoir offert toutes ses filles à Dieu, après avoir subi un long veuvage, il envisage son avenir. Il se rend à l’église de son mariage et là, il reçoit « de si grandes grâces, de telles consolations », que dans un mouvement de confiance, il fait cette prière de donation totale de son être : « Mon Dieu, je suis trop heureux, il n’est pas possible d’aller au Ciel comme cela : je veux souffrir quelque chose pour Vous ! » et il s’offre lui-même. Quelques temps plus tard, il a une atteinte cérébrale, il a des gestes violents, il fait une fugue, il est mis à l’hospice (hôpital psychiatrique), devant se détacher de TOUT : de lui-même (paralysé), de ses droits paternels (mis sous tutelle), séparé des siens… … « Oui j’ai un but, c’est d’aimer Dieu de tout mon cœur » avait-il dit au début de sa maladie. Dans ses moments de lucidité, il est tout tourné vers les autres au point que son infirmière le déclare « son missionnaire » dans le service. Quant aux prières auxquelles on veut l’associer pour sa guérison, il répond : « Il faut seulement demander la volonté du bon Dieu ». Le jour où il retrouvera ses filles au Carmel, il ne pourra que lever le doigt au ciel pour leur signifier que « là-haut on se retrouvera ». Zélie donnera son propre témoignage : elle s’accrochait à la vie pour sauver sa Léonie. Le jour où ses forces déclinent, elle lâche prise : c’est que le bon Dieu fera mieux qu’elle pour sa Léonie. Et l’on sait ce que Dieu a fait pour Léonie, et continue de faire à travers elle.
C’est bien ce que signifiait Zélie, et qui a été écrit sur le reliquaire : « Nous ne serons heureux que lorsque nous serons tous réunis au Ciel ». (Le pape Léon, ce mercredi à l’audience, nous le rappelait : sur terre nous ressentons toujours un manque, la plénitude nous ne la trouverons qu’au Ciel.)
La boucle est bouclée : tout est reçu de Dieu, tout est donné à Dieu. Rendons grâce à l’Esprit Saint qui s’est engagé le jour de leur mariage, qui a conduit toutes choses, et qui a poussé l’Eglise à canoniser des couples, au service de la sainteté des familles et de tous ceux qui demandent leur aide.
Pour que le cadre soit complet, il faut ajouter la Vierge Marie. La statue que nous appelons la Vierge du Sourire a été donnée à Louis jeune homme. Elle est au cœur de la famille. Thérèse nous dit pourquoi dans son poème « Pourquoi je t’aime Ô Marie ». Marie est la mère et le modèle au cœur de la vie ordinaire des familles. Elle a parfaitement correspondu à la volonté de Dieu en accueillant sa Parole et en consentant à ce qui lui était demandé au jour le jour. Et nous vivons de la grande fécondité de sa foi, de son espérance et de sa charité.
En simple conclusion : comment ne pas rejoindre la cordée de toute cette famille Martin qui, dans une vie des plus normales – comme la nôtre -, a répondu à l’appel universel à la sainteté de notre Père des cieux ? Que nous disent-il à chacun de nous ? Dans ce domaine, il n’y a pas de copier-coller. Chacun a SA réponse à donner. Même si toutes les filles Martin sont devenues religieuses, chacune a la caractéristique de son appel et de sa réponse personnelle. Ils nous encouragent à correspondre à la volonté de Dieu sur nous personnellement, en marchant vers le but, avec les ingrédients que Dieu lui-même nous a donnés au baptême, la foi, l’espérance et la charité au service de l’Esprit Saint, en ne s’appuyant que sur Lui, fidèlement, pour la réaliser.
